À l’automne, quand les feuilles tombent et que les abeilles se font plus discrètes, c’est le moment où tout apiculteur pense à une seule chose : le varroa. Ce petit parasite, à peine visible à l’œil nu, est le fléau silencieux des ruchers. Il s’accroche au corps des abeilles, se nourrit de leur hémolymphe et affaiblit peu à peu toute la colonie.
Pendant longtemps, j’avais entendu parler de traitements “miracles”, de produits naturels ou chimiques à utiliser selon les saisons. Mais rien ne semblait vraiment fonctionner durablement. Jusqu’au jour où mon apiculteur, fort de trente ans d’expérience, m’a montré sa méthode d’automne — simple, efficace et respectueuse des abeilles.
Ce qu’il m’a expliqué ce jour-là a complètement changé ma façon d’aborder la santé de mes ruches.
Table des matières
Comprendre pourquoi l’automne est la période clé
Avant de traiter, il faut comprendre le moment. En automne, les abeilles d’été meurent peu à peu et la colonie se prépare pour l’hiver. C’est aussi la période où naissent les abeilles d’hiver, celles qui doivent survivre plusieurs mois dans la ruche jusqu’au retour du printemps.
Si ces jeunes abeilles sont parasitées par le varroa, elles entreront affaiblies dans la saison froide. Leur durée de vie sera réduite, et la colonie risque de ne pas passer l’hiver. D’où l’importance cruciale du traitement d’automne, qui vise à éliminer le maximum de varroas avant que la population d’abeilles ne se stabilise.
Le timing idéal se situe juste après la dernière récolte de miel, quand les hausses sont retirées. À ce moment, les abeilles ne produisent plus pour la consommation humaine, ce qui permet d’utiliser des traitements plus concentrés sans risque de contamination du miel.
Et pendant que les abeilles s’activent à préparer la mauvaise saison, c’est aussi le moment idéal pour penser au reste du jardin : planter quelques bulbes d’automne permettra, dès le printemps, de profiter d’un jardin fleuri bien plus longtemps.
Le principe du traitement naturel
Mon apiculteur ne jure que par une approche à base d’acide oxalique et de contrôle rigoureux du couvain. Ce produit, naturellement présent dans certaines plantes, est reconnu depuis longtemps comme un traitement efficace contre le varroa lorsqu’il est bien dosé.
Il existe deux principales méthodes : le dégouttement et la sublimation. Dans son cas, il privilégie le dégouttement, plus simple à mettre en œuvre pour les apiculteurs amateurs.
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Préparer la solution
Le mélange se compose d’eau, de sucre et d’acide oxalique dihydraté, à des doses précises pour éviter tout risque pour les abeilles. -
Appliquer au bon moment
L’application se fait sur une colonie quasiment sans couvain, car les varroas se réfugient dans les cellules operculées. Sans couvain, le produit touche directement les parasites sur les abeilles adultes. -
Verser doucement entre les cadres
Avec une seringue ou un doseur, on verse lentement la solution entre les ruelles où se regroupent les abeilles. Quelques millilitres suffisent par ruche.
Ce geste paraît simple, mais il exige calme, précision et respect du cycle des abeilles.
Pourquoi cette méthode fonctionne mieux que les autres
Beaucoup de traitements échouent parce qu’ils sont mal synchronisés ou trop agressifs. Certains produits chimiques éliminent certes le varroa, mais affaiblissent la colonie à long terme ou laissent des résidus dans la cire.
Le traitement à l’acide oxalique, lui, agit en douceur. Il ne laisse aucune trace dans le miel et n’altère pas la qualité de la cire. Son efficacité dépasse souvent 90 % lorsque le couvain est absent.
Mon apiculteur insiste sur un point : tout repose sur le suivi. Avant chaque traitement, il observe le fond de la ruche pour estimer la chute naturelle des varroas. Après application, il refait la mesure pour s’assurer du résultat. C’est ce contrôle qui permet de savoir si le traitement a réellement fonctionné, et s’il faut le compléter.
L’importance de la préparation du couvain
Avant d’appliquer la solution, il m’a montré une autre étape cruciale : la gestion du couvain. Fin septembre, il limite volontairement la ponte de la reine en réduisant légèrement la surface de ponte. Cela permet au couvain de se vider progressivement.
Une fois que les dernières jeunes abeilles sont nées, la colonie est presque sans couvain. C’est à ce moment précis que le traitement devient redoutablement efficace.
Certaines années, il complète cette étape par un passage rapide d’acide formique au tout début de l’automne, un traitement naturel mais plus puissant, qui permet de préparer le terrain pour l’acide oxalique.
Le rôle de l’environnement autour des ruches
Ce que j’ai aussi appris, c’est que le traitement seul ne suffit pas. Les ruches affaiblies par un manque de ressources, un emplacement humide ou un déséquilibre floral sont plus vulnérables.
Dans son rucher, chaque ruche est installée sur un support surélevé et bien ventilé. Les alentours sont semés de fleurs mellifères : trèfles, phacélies, lavandes. Ces plantes attirent les butineuses jusqu’à la fin de la saison et renforcent la vitalité de la colonie avant l’hiver.
C’est ce mélange de soins internes et externes qui fait toute la différence.
Les résultats visibles
Quelques jours après le traitement, le fond de la ruche se couvre de minuscules points bruns : les varroas morts. Une vision à la fois satisfaisante et effrayante. Sans cette action, tous ces parasites auraient survécu pour se reproduire à nouveau.
Les abeilles, elles, paraissent plus actives. La colonie retrouve un calme stable, signe que l’équilibre interne est revenu. Les abeilles d’hiver peuvent alors se préparer à affronter les mois froids avec des réserves solides et un corps sain.
L’année suivante, les ruches traitées correctement à l’automne démarrent plus vite et offrent une récolte plus régulière.
Conclusion
Ce que mon apiculteur m’a transmis dépasse la simple technique : c’est une philosophie. Observer, comprendre le rythme de la ruche, agir au bon moment et toujours avec mesure. Le traitement d’automne n’est pas un geste mécanique, c’est un acte de soin.
En appliquant cette méthode à base d’acide oxalique sur une colonie sans couvain, on protège l’essence même du rucher. Et plus encore, on participe à la survie des abeilles, ces ouvrières indispensables à la vie sur Terre.
Et si vous cherchez d’autres gestes d’automne à adopter, découvrez pourquoi enfouir certaines épluchures en octobre rend la terre plus fertile que n’importe quel engrais, un autre secret de la nature qui travaille en silence, tout comme les abeilles.
